Les techniques de gestion des risques des systémes de paiement
Les principes de gestion des risques dans les systèmes DVP
Le principe de base tient à la coordination des deux legs de la transaction (livraison des titres et paiement du cash) : la livraison des titres n ‘a lieu que si – et seulement si-le règlement du cash est déjà effectué (une fois enregistrées les deux parties de la transaction sont irrévocables). Comme dans les systèmes RTGS, l’objectif est donc de parvenir à une quasi-simultanéité des deux opérations afin d’éviter un décalage permettant à l’une des parties de ne pas remplir ses obligations, alors que l’autre s’est déjà exécutée.
L’application de ce principe n’assure pas une sécurité absolue : certes il supprime le risque de contrepartie, mais il n’élimine pas les autres risques (risque de financement, risque de liquidité, risque systémique). L’opérateur victime d’une défaillance de l’autre partie doit refaire la transaction à des conditions qui ont changé. Le principe de simultanéité ne supprime pas non plus le risque de gridlock si chaque opérateur repousse l’approvisionnement de son compte dans l’espoir de bénéficier de la liquidité des autres participants.
La gestion des risques dans les différents modèles DVP
En combinant les deux procédures possibles – nette ou brute – et les deux parties de l’opération – l’une sur les titres (livraison), l’autre sur le cash (règlement) – nous avons théoriquement quatre combinaisons possibles :
1) livraison BRUT des titres/règlement BRUT du cash,
2) livraison NET des titres/règlement NET du cash,
3) livraison BRUT des titres/règlement NET du cash.
Le derniers cas : 4) livraison NET des titres/règlement BRUT du cash – n’a pas lieu d’être examiné puisqu’il répond par construction aux critères de gestion des risques (le règlement du cash par un système brut intervient nécessairement AVANT la livraison des titres par un système net).
Modèles 1 : livraison BRUT des titres/règlement BRUT du cash
Le système BRUT/BRUT (« Gross/Gross » ou encore « Trade-by- Trade ») élimine le risque de contrepartie et le risque en capital, mais il ne supprime pas les autres risques (risque de financement, risque de liquidité, risque systémique), même s’ils sont considérablement réduits.
Les deux opérations étant simultanées, un opérateur ne va pas initier une transaction s’il y a un risque identifié à ce moment précis. À la différence des systèmes de conservation de titres qui effectuent des livraisons en mode « brut », les systèmes de règlement « brut » de la contrepartie cash nécessitent l’immobilisation de balances importantes. L’apport de liquidité complémentaire passe par la mise en place de lignes de crédit intraday. Ces lignes sont généralement associées à la constitution de collatéral (les titres qui font l’objet de la transaction peuvent servir de collatéral suivant une procédure de self-collateralization).
Le système BRUT/BRUT est le seul système véritablement « efficace et sûr », le seul qui assure la finalisation simultanée des deux opérations (sur titres et sur cash). Mais comme tous les systèmes RTGS, le système BRUT/BRUT est gros consommateur de liquidité. Le coût de la liquidité (coût d’opportunité du collatéral immobilisé, commission d’engagement des lignes de crédit confirmées) vient s’ajouter aux coûts de transaction (commissions de cession, intérêts versés sur les transactions financées par emprunt). C’est ainsi qu’une opération d’arbitrage bénéficiaire sur la base des conditions de marché alors prévalentes peut devenir déficitaire par le fait des coûts de transaction.
Modèle 2 : livraison BRUT des titres/règlement NET du cash
Dans le modèle 2, la livraison des titres se fait immédiatement par un système brut tandis que le règlement cash n’est finalisé qu’au terme d’une procédure de compensation et de règlement net. Ce modèle cumule tous les risques. La livraison des titres a lieu en temps réel (si les titres sont disponibles) AVANT le règlement du cash qui est différé et n’intervient dans le pire des cas qu’en fin de journée. 11 faut donc préétablir des mesures de prévention des risques (comme des garanties bancaires ou « assured pay- ment system »). Cette technique se contente de reporter le risque du client sur la banque qui a émis la garantie. Le risque de financement peut être couvert soit au moyen d’auto-couverture par des opérations simultanées d’achat et de vente, soit par le recours à des instruments de couverture à terme (dont le coût s’ajoute aux coûts de transaction).
Modèle 3 : livraison NET des titres/règlement NET du cash
Le modèle NET/NET cumule tous les inconvénients. Les deux opérations (sur titres et sur cash) qui composent la transaction sont différées. Les opérateurs ignorent à quel moment interviennent respectivement la livraison des titres et le règlement du cash, ils ne savent pas quand la transaction peut être considérée comme définitive. Le système de règle¬ment/livraison NET/NET additionne les risques du fait de l’incertitude qui pèse sur la finalisation des deux parties de la transaction.
Il y a risque de contrepartie quand la livraison des titres intervient AVANT le règlement du cash. Mais le risque de contrepartie porte à la fois sur les titres et sur le cash. Il y a risque de crédit quand l’une des parties en cause est défaillante (ce peut être l’une des parties de la transaction ou encore l’une des deux banques chargées de l’exécution de l’ordre : l’une pour la partie titres, l’autre pour la partie cash, sans compter le risque de crédit des organismes de conservation et de règlement). Il y a risque de volatilité des cours et des taux d’intérêt, si l’une des parties est obligée de se substituer à l’autre partie défaillante (acheter les titres qui n’ont pas été livrés ou vendre les titres qui n’ont pas été payés). Il y a risque de liquidité si les fonds ou les titres ne sont pas disponibles au moment prescrit.
Les moyens de sécuriser les systèmes NET/NET font appel à toutes les techniques de gestion des risques : lignes de crédit bilatérales et collectives, constitution de collatéral, facilités de crédit intraday, systèmes de caps, etc. Mais il n’y a qu’une technique qui soit véritablement efficace : ne livrer les titres que lorsque l’opération de règlement cash a été dûment enregistrée et finalisée.