L'économie de réseaux
Les réseaux véhiculent de l’information. L’économie de réseau obéit à des lois qui tiennent aussi bien à la nature des biens échangés (les biens d’information) qu’à la logique du marché (dans une certaine mesure l’économie de réseau s’écarte des lois de l’économie de marché).
Le marché des biens d’information
Un ordre de paiement est une information. Les biens d’information comprennent aussi bien le contenu de l’information que les canaux de l’information. Le contenu de l’information regroupe les données de l’ordre de paiement : le montant, la date, l’émetteur, le bénéficiaire, le choix d’un système de paiement et d’une banque de compensation. Les canaux de l’information comprennent toutes les infrastructures : le réseau de communication qui transmet les données, l’ordinateur qui stocke les données, le logiciel qui assure le traitement de ces données, le serveur qui oriente les données vers leurs destinataires.
La courbe d’offre : les rendements croissants
Comme tous les réseaux d’information, les systèmes de paiement nécessitent des investissements lourds. En revanche, les coûts d’exploitation sont faibles. Dans les coûts de production, l’amortissement des infrastructures représente l’essentiel tandis que les frais de fonctionnement (coûts de transmission et coûts de traitement) sont faibles, voire négligeables par rapport au volume des investissements. Du fait de leur nature immatérielle, les biens d’information sont reproductibles à des coûts quasi nuls. Dès lors que le break even est franchi, la rentabilité du système s’accroît plus que proportionnellement avec le nombre de ses participants. Le modèle entre dans une phase de rendements croissants.
En théorie, l’économie de réseau ne connaît pas la loi des rendements décroissants, du moins pas à l’intérieur d’un certain cycle d’innovation :
– les investissements progressent par paliers suivant les projections de trafic. A l’intérieur d’un cycle d’innovation, le coût des investissements augmente moins vite que le volume des capacités installées ;
– l’innovation brouille les perspectives d’amortissement. Le renouvellement rapide des équipements est nécessaire pour maintenir un niveau de performance compétitif ;
– les coûts de migration (d’un système à l’autre) sont extrêmement élevés, ce qui entraîne une certaine inertie dans le jeu des prix comparés.
De ce fait, les systèmes de paiement posent un problème de dimension- nement de l’investissement. Sachant que c’est l’offre qui commande la demande, les promoteurs du système ignorent le volume du trafic prévisionnel sur lequel fonder leurs décisions d’investissement. Ils ignorent la longueur du cycle d’innovation qui conditionne la durée de vie des installations et la valeur du know-how. Un produit ou un service peut être surclassé par un nouveau produit. Un réseau de télécommunication ou un système d’exploitation peut être rendu obsolète par un nouveau système avant même d’être complètement amorti1.
La courbe de demande : l’économie d’attention
Les coûts marginaux étant quasi nuls, le prix de transaction d’un système de paiement est fixé non en fonction des coûts mais en fonction des besoins exprimés par l’utilisateur. Libérés des préoccupations de coût marginal, les gestionnaires des systèmes de paiement suivent de près les besoins exprimés par les usagers et les services fournis par la concurrence. Par la mise en place de cellules de « veille » technologique et commerciale, il s’agit de prévenir et si possible d’anticiper les évolutions technologiques et de détecter les nouveaux besoins engendrés par les nouvelles technologies.
Les coûts de transaction à la charge de l’usager sont fixés sur la base de certaines hypothèses de trafic, c’est-à-dire sur la capacité du système d’attirer un certain nombre d’usagers sur le réseau.
Le plus souvent, le consommateur ne connaît pas la valeur d’un bien d’information tant qu’il n’en dispose pas (ce que Stieglitz appelle « the infinité regress »). L’usager doit choisir parmi les innombrables biens d’information qui lui sont proposés. En outre, les comparaisons sont impossibles puisque les biens sont commercialisés sous des formes indéfiniment différenciées. Le processus est auto-entretenu : la prolifération d’informations difficiles à évaluer crée une incertitude qui relance la demande d’information.
Les coûts fixes (cf) sont importants mais fixes (la courbe S est horizontale).
Les coûts de reproduction et les coûts marginaux (cm) sont très faibles voire négligeables (proches de 0). L’offre crée la demande. Le prix d’équi¬libre et le taux de profit sont déterminés par la courbe de demande D. Les coûts d’entrée très élevés tiennent la concurrence à l’écart du marché, surtout lorsque l’effet de feed-back est engagé (quand B est a droite de a). Dès que la courbe de production a franchi le point mort (a), les profits aug¬mentent rapidement (les coûts marginaux sont faibles). Les courbes d’offre marginale (cm) et de demande D ne se recoupent pas, le marché est dans une phase de croissance endogène et de rendements croissants. Le modèle s’interrompt en C aux limites physiques de l’offre S (obsolescence du produit) et/ou de la demande D (saturation du marché).
Le régime de marché : la concurrence monopolistique
Dans un premier temps, les systèmes de paiement tendent à se diversifier pour exploiter une nouvelle technologie, un nouveau marché ou un nouveau service. Puis sous la pression de l’innovation et le poids des investissements, ils s’engagent dans une phase de concentration. L’interconnexion des systèmes, la fusion des réseaux, les accords de clearing et de liquidité, l’installation de plates-formes communes permettent d’augmenter le nombre d’utilisateurs, de baisser les coûts unitaires, de commercialiser de nouveaux produits à forte valeur ajoutée et ainsi d’améliorer le taux de compensation et le rendement de l’investissement.
Les coûts fixes (cf) sont importants mais fixes (la courbe S est horizontale).
Les coûts de reproduction et les coûts marginaux (cm) sont très faibles voire négligeables (proches de 0). L’offre crée la demande. Le prix d’équilibre et le taux de profit sont déterminés par la courbe de demande D. Les coûts d’entrée très élevés tiennent la concurrence à l’écart du marché, surtout lorsque l’effet de feed-back est engagé (quand B est a droite de a). Dès que la courbe de production a franchi le point mort (a), les profits aug¬mentent rapidement (les coûts marginaux sont faibles). Les courbes d’offre marginale (cm) et de demande ne se recoupent pas, le marché est dans une phase de croissance endogène et de rendements croissants. Le modèle s’interrompt en C aux limites physiques de l’offre S (obsolescence du produit) et/ou de la demande (saturation du marché).
Le régime de marché : la concurrence monopolistique
Dans un premier temps, les systèmes de paiement tendent à se diversifier pour exploiter une nouvelle technologie, un nouveau marché ou un nouveau service. Puis sous la pression de l’innovation et le poids des investissements, ils s’engagent dans une phase de concentration. L’interconnexion des systèmes, la fusion des réseaux, les accords de clearing et de liquidité, l’installation de plates-formes communes permettent d’augmenter le nombre d’utilisateurs, de baisser les coûts unitaires, de commercialiser de nouveaux produits à forte valeur ajoutée et ainsi d’améliorer le taux de compensation et le rendement de l’investissement.
Dans la théorie classique des rendements décroissants,
Dans la théorie des biens d’information, les rendements augmentent faiblement dans un premier temps, puis connaissent une croissance très rapide lorsque l’innovation entre dans la phase d’exploitation. Lorsque la croissance se ralentit, la hausse des profits baisse mais les rendements demeurent croissants car les frais d’amortissement des biens d’équipement qui représentent l’essentiel des coûts deviennent de plus en plus faibles.
L ’effet de feed-back
Plus un réseau s’étend, plus sa valeur augmente et plus l’incitation a le rejoindre augmente. La stratégie de réseau consiste donc à attirer de nou¬veaux participants pour atteindre le seuil critique (par exemple au moyen de services annexes à forte valeur ajoutée). On peut considérer qu’un réseau a atteint le seuil critique, quand se déclenche l’effet de feed back : à partir du seuil critique, les utilisateurs potentiels sont incités à rejoindre le réseau existant plutôt que d’en créer un de toutes pièces. Plus le nombre de participants s’accroît, plus les coûts d’adhésion baissent et plus le coût d’un nouveau système augmente. Le système de paiement se trouve alors en situation de quasi-monopole (Internet) aussi longtemps qu’il peut maintenir son avance technologique ou commerciale. Sa situation de quasi-monopole sur certains créneaux lui permet même de tolérer certains retards dans l’adoption des nouvelles technologies ou le lancement de nouveaux produits et services par rapport aux systèmes concurrents (France-Telecom). Un système de paiement qui a dépassé le break even est assuré d’une certaine pérennité par le seul fait qu’il réunit un nombre critique de banques (SWIFT). Le coût élevé des investissements initiaux et des acquis technologiques, les coûts dissuasifs de migration ou de créa¬tion ex nihilo, les délais de mise en place de nouveaux systèmes et plus encore les délais pour atteindre la masse critique, autant d’obstacles au libre jeu de la concurrence. Les systèmes de paiement sont par nature des organismes monopolistiques ou oligopolistiques.
La prime au premier entrant
Plus un réseau s’étend, plus le coût de renouvellement à l’identique aug¬mente. Le coût d’investissement initial d’un nouveau système de paiement s’accroît au fur et à mesure que le système existant s’étend. Plus les concurrents tardent à se décider (rejoindre le système existant ou en créer un nouveau), plus l’opération sera coûteuse. Dans un cas comme dans l’autre, les nouveaux entrants sont pénalisés, alors que les membres fondateurs bénéficient d’une prime au premier entrant. Un réseau bien établi peut durablement bloquer l’accession d’un nouvel entrant sur le marché, même si celui-ci bénéficie d’une technologie plus performante ou d’une gamme de services plus étendue.
Tant que le marché est ouvert, il peut être justifié de lancer un système séparé, surtout si le nouveau réseau peut faire état d’innovations technologiques et commerciales. Le temps passant, le réseau existant aura pris une telle avance qu’il sera de plus en plus difficile de lancer un système concurrent. L’investissement serait à la fois de plus en plus coûteux et de plus en plus aléatoire. En revanche, si le réseau en place, confiant dans sa situation de monopole, ne « colle » pas à l’innovation ou diffère les indispensables investissements de remise à niveau (afin d’amortir l’investissement initial sur une plus longue série), le réseau devient vulnérable. Apparaissent des « fenêtres de tir » où un tiers peut être tenté de lancer son propre réseau.
Les plus-values de réseau posent le problème de la rémunération des premiers investisseurs par les adhérents plus tardifs (sous forme de droits d’adhésion). Mais ce droit d’entrée ne doit pas être dissuasif car chaque nouveau membre augmente la valeur du système dans son ensemble et, par voie de conséquence, la part des autres membres du réseau.
Vidéo : L’économie de réseaux
Vidéo démonstrative pour tout savoir sur : L’économie de réseaux
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