Les organismes de tutelle des systèmes de paiement
Les organismes nationaux : les banques centrales
Traditionnellement les banques centrales remplissent trois fonctions statutaires que l’on retrouve plus ou moins dans toutes les législations :
- la définition et la mise en œuvre de la politique monétaire,
- le contrôle du système bancaire,
- la supervision du système de paiement.
Les fonctions de supervision et d’oversight ont pour objet de garantir le bon fonctionnement des systèmes de paiement. La solvabilité du secteur bancaire et la stabilité du système financier dépendent de l’efficacité et de
la sécurité du système des paiements. La banque centrale exerce son contrôle a priori et a posteriori sur le système lui même, sur l’opérateur et sur les banques participantes. Elle est associée à la conception et à la mise en œuvre des projets de développement. Elle assure une « veille » juridique, technologique, financière du système. La banque centrale n’est certes pas indifférente aux objectifs commerciaux de la communauté bancaire, aux performances et à la compétitivité de la place. Les statuts de la Banque de France qui a longtemps été perçue comme une institution de l’appareil de l’État, chargée de la tutelle du secteur bancaire, tend à se rapprocher celui de la Banque d’Angleterre qui s’est toujours considérée comme membre à part entière de la communauté bancaire.
Les fonctions de régulation ayant pour but d’assurer la stabilité du système bancaire et financier (le contrôle des institutions financières, la surveillance des marchés financiers, la supervision des systèmes de paiement) sont souvent partagées entre la banque centrale, les organismes professionnels et les organismes publics. Ainsi la supervision des banques allemandes est assurée par un organisme d’Etat, la BaFin ou Bundesanstalt für Finanzdienstleistungsaufsicht, indépendant de la banque centrale. L’une est installée à Berlin, l’autre à Francfort.
Les organismes internationaux : la BRI
La gestion des risques est devenue un problème de coopération internationale. Il s’agit d’assurer la solidité du système financier et d’éviter que les pressions de la concurrence n’amènent les banques à baisser les standards d’évaluation des risques. En tant que banque des banques centrales, la Banque des Règlements Internationaux était particulièrement bien placée pour servir de point de rencontre entre les banques centrales. Depuis le début des années 80, le Committee on Payment and Settlement System (CPSS), abrité par la BRI, a diligenté de nombreuses études portant sur l’analyse des risques et formulé un certain nombre de recommandations qui ont été adoptées par la communauté bancaire internationale.
Un « Committee on Interbank Netting Schemes of the Central Banks of the Group of Ten Countries », réunissant les spécialistes des différentes Banques Centrales du Groupe des Dix, a publié un premier rapport en novembre 1990. Le « rapport Lamfalussy » (du nom du Président en exercice de la BRI) analyse les accords de compensation cross-border/multi- currency et fixe une liste de 6 normes minimums. Devenu un organisme permanent sous le nom de CPSS ou Committee on Payment and Settlement Systems, il s’est ouvert à 11 autres banques centrales, ainsi qu’à des repré¬sentants du FMI et de la Banque Mondiale. Un groupe de travail (Task Force on Payment System Principles and Practice) a établi une liste de « Core Principles for systemically important systems » (2001), c’est-à-dire de normes applicables aux systèmes de paiement particulièrement exposés au risque systémique – comme les systèmes RTGS (voir annexe).
Le ratio Cook institué par les accords de Bâle I de 1988 en vigueur depuis le 1er janvier 1993 fixe un ratio de solvabilité exprimé par un rapport entre les fonds propres et les risques pondérés suivant leur nature. Il comprend deux ratios : d’après Tier 1, le montant des fonds propres (capital et réserves) ne doit pas tomber en dessous de 4 % des risques pondérés ; d’après Tier 2, le montant des fonds propres auxquels s’ajoutent certains éléments complémentaires (comme les titres assimilés, les provisions de caractère général, les obligations subordonnées), doit être au moins égal à 8 % des risques pondérés. Conformément aux accords de Bâle II, le ratio McDonought (du nom du président du comité de Bâle alors Président de la Fédéral Reserve Bank of New York) étend les risques pris en compte : aux risques de crédit et de marché sont ajoutés les risques dits opérationnels. À la demande des banques, l’application du ratio Bâle II a été repoussée à fin 2007.
À côté de la BRI, il faut également mentionner le FMI et la Banque Mondiale qui développent un programme commun (FSAP ou Financial Sector Assessment Programme) chargé de vérifier dans quelle mesure les pays observent les « Core Principles » du CPSS, les normes ÎOSCO (International Organisation of Securities Commissions) et le « Transparency Code » du FMI ainsi que toute une batterie de codes et de standards.
À la définition traditionnelle des risques bancaires s’est substitué le concept de « Value at Risk » (VAR) qui mesure l’impact de la défaillance d’un participant ou d’un système sur le bon fonctionnement des marchés. L’appréciation du risque est renversée : il ne s’agit plus de mesurer le risque mais de déterminer le risque maximum que peut supporter un système ou une banque. Il faut garantir l’imprévisible comme le déclenchement d’une crise systémique. Le concept de VAR permet de distinguer les systemically important Systems soumis à une surveillance particulière (règlement en monnaie centrale). A l’inverse, le développement de moyens de paiement non bancaires et de systèmes de paiement indépendants (quasi- systèmes) crée une zone de non droit qui échappe au contrôle et à la supervision de la banque centrale.
Les progrès de la technologie ont des effets contradictoires sur les systèmes de paiement : ils fournissent des instruments pour mieux maîtriser les risques, mais ils sont aussi la source de nouveaux risques. Dans un secteur aussi concurrentiel que celui des systèmes de paiement, la gestion des risques exige donc une interopérabilité et une interbancarité toujours plus étendues (avec les risques de monopole technique). L’intervention des pouvoirs publics est également requise pour assurer la stabilité du système financier et la protection du consommateur. Les banques doivent arbitrer les objectifs de sécurité avec les autres – économiques et commerciaux – comme la maîtrise des coûts, les performances de la compensation, la diversification des produits. Pour pallier les risques de déséquilibre entre les objectifs, les pouvoirs publics se doivent d’intervenir (le zéro hourrule, la finalité des paiements, le régime du collatéral). Les banques centrales s’associent pour élaborer et faire appliquer les « Cores Principles ».
Du fait de l’asynchronie des ordres de paiement et de l’asymétrie de l’information, la gestion des risques financiers nécessite le recours à une source de liquidité externe et donc à l’intervention de la banque centrale. Le principe du central banking, qui pourrait favoriser un certain laxisme des banques en centralisant les réserves au niveau de la banque centrale, est corrigé par le principe du moral hazard qui laisse la création de moyens de paiement supplémentaires à la discrétion de la banque centrale (« principe d’incertitude créatrice »). Les banques commerciales sont libres d’augmenter leurs engagements mais le refinancement est à la discrétion de la banque centrale.
Dans un contexte néo-libéral, les systèmes de paiement se sont développés dans un certain vide juridique et institutionnel. Ils sont condamnés à être de plus en plus encadrés par les pouvoirs publics. La réglementation a pour but de concilier les inconciliables : faire coexister la coordination/coopération au sein des systèmes et entre les systèmes et la concurrence entre les systèmes et entre les participants d’un même système.
Vidéo : Les organismes de tutelle des systèmes de paiement
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