Une globalisation financière au service des pays riches : la croissance vertigineuse de la finance mondiale
L’explosion de la finance à l’échelle planétaire est sans doute l’aspect le plus spectaculaire de la mondialisation contemporaine. Les données statistiques parlent d’elles-mêmes.
Prenons le marché des changes, sur lequel sont échangées les monnaies entre elles. Ce marché planétaire est le symbole de la globalisation financière : chaque jour, il s’y échange plus de 2 000 milliards de dollars, soit à peu près l’équivalent du PIB annuel de la France ! Autre indication révélatrice : la taille du marché des changes n’a cessé d’augmenter. Le ratio du volume des transactions sur ce marché par rapport au commerce mondial des biens et services est passé de deux pour un en 1973 à dix pour un en 1980, cinquante pour un vers 1992, et cent pour un en 2006.
L’explication est simple : dans le passé, la fonction du système financier international était de financer le commerce international et les balances des paiements. Aujourd’hui, la finance globalisée suit sa propre logique, qui n’a plus qu’un rapport indirect avec l’économie mondiale. L’essentiel des opérations se résume à des va-et-vient incessants, de nature spéculative, entre les monnaies et les principales places financières de la planète.
Dans Le Nouveau Mur de l’argent l’économiste François Morin propose des estimations statistiques originales sur ce qu’il appelle la « démesure » de la finance internationale. Il calcule le montant les liquidités qui transitent à l’échelle mondiale sur les marchés interbancaires et servent au règlement des échanges de biens et services et des opérations financières. En 2005, ces liquidités représentaient plus de 2 000 téra-dollars (le téra-dollar correspond à 1 000 milliards de dollars, soit 1 « trillion de dollars » à l’américaine), ce qui est environ 50 fois supérieur au PIB mondial de la même année (44,8 téra-dollars). Selon l’auteur, cette asymétrie profonde entre flux réels et financiers – déjà mentionnée plus haut – illustre l’emprise de la finance sur la sphère réelle de l’économie (le PIB). D’où l’image d’un « nouveau mur de l’argent » dressé par les détenteurs du capital financier, par référence au mur de la finance qui s’était opposé à l’expérience du cartel des gauches en France pendant l’entre-deux-guerres.