Le savoir et la finance: dynamique du capitalisme et de la mondialisation
Après avoir favorisé une croissance rapide de la production pendant les Trente Glorieuses (1945-1975), le capitalisme fordiste entre en crise à partir des années 1970, avec le ralentissement de la croissance et la montée de l’inflation. Un facteur décisif de la crise a été la décélération des gains de productivité qui est allée de pair avec une baisse des profits des entreprises. Cette évolution résultait de la perte d’efficacité des méthodes tayloriennes d’organisation du travail ainsi que de la montée des conflits sociaux à propos de la distribution des revenus, conflits à l’origine de tensions inflationnistes. Les évènements de 1968 et l’échec des accords de Grenelle – portant sur la revalorisation des salaires et la reconnaissance des droits syndicaux dans l’entreprise – en sont l’illustration en France.
La crise du capitalisme fordiste résulte aussi de la déstabilisation du Système monétaire international (SMI). Le régime de changes fixes – qui assurait la stabilité des monnaies entre elles dans le cadre du SMI de Bretton Woods – est remplacé en 1973 par un régime de changes flexibles. Les régulations nationales s’en trouvent fragilisées, et les économies deviennent de plus en plus interdépendantes : c’est le début du processus de mondialisation. L’impératif de compétitivité extérieure, lié à l’apparition de déficits extérieurs amplifiés par les chocs pétroliers de 1973 et 1979, remet en question la dynamique vertueuse des années 1960.
Cela va conduire à un basculement vers une nouvelle phase du capitalisme, souvent qualifiée de « postfordiste », d’une part, et vers une accélération du processus de mondialisation, d’autre part . Plusieurs changements majeurs vont y contribuer. Tout d’abord, à partir de la fin des années 1970, en réaction à la crise du régime fordiste, mais aussi en réponse aux nouvelles contraintes des entreprises dans la compétition technologique internationale, les politiques économiques changent de cap dans les principaux pays industrialisés. Ces politiques, qui accompagnent les changements structurels des économies capitalistes, prennent le parti d’une nouvelle régulation macroéconomique axée sur la lutte contre l’inflation, la libéralisation et la modernisation du système financier, et la déréglementation des marchés du travail.
Les principaux piliers du capitalisme fordiste sont remis en cause. Les politiques de rigueur salariale déconnectent l’évolution des salaires des gains de productivité ; les politiques de libéralisation et de privatisation font reculer la régulation publique et les réformes bouleversent le système financier : à un système dominé par la finance bancaire et largement administré par les pouvoirs publics se substitue un nouveau système faisant une place croissante à des marchés financiers libéralisés.
À la suite de ces choix politiques, un nouveau régime de croissance « postfordiste » se met progressivement en place. La création de richesse financière par les entreprises en constitue le cœur. Ses principales caractéristiques sont : un nouveau partage des richesses au sein des entreprises ; le rôle primordial des marchés d’actions et des investisseurs institutionnels (les « zinzins ») ; la prépondérance de la logique actionnariale induisant de nouvelles formes de gouvernement d’entreprise ; de nouveaux comportements financiers de la part des entreprises et des particuliers ; enfin, la perte d’autonomie des politiques économiques face aux marchés financiers.
La crise du fordisme est également l’occasion de changements profonds dans les modes de consommation et les formes de la concurrence. La saturation des besoins de base liée à la demande de biens de consommation matériels et standardisés est à l’origine de changements structurels importants dans la composition de la demande (renforcement de la consommation immatérielle qui va de pair avec une plus grande sensibilité à la différenciation des produits et une versatilité accrue des comportements des consommateurs). Avec la saturation des besoins fondamentaux et l’enrichissement individuel dans les sociétés « avancées », la demande se reporte sur les services, notamment la santé, la culture et les loisirs, dont une partie fait l’objet de consommations collectives ; la commercialisation des biens matériels s’accompagne d’un contenu croissant en services (garanties, assistance à l’utilisateur, assurance, crédit, etc.), le goût pour la technologie ou les sciences dures s’émousse (difficulté à recruter dans les filières d’enseignement correspondantes) et la préservation de l’environnement est fortement valorisée. La préférence pour la variété est liée au niveau de développement et à l’élévation du revenu par tête.
La faible rentabilité des entreprises sur les marchés domestiques des pays développés a conduit ces dernières à privilégier de plus en plus la recherche de débouchés extérieurs. Les entreprises, américaines et allemandes en particulier, en délocalisant massivement, durant les années 1970, une partie de leurs processus de production vers les pays en développement, d’Asie notamment, ont favorisé leur émergence comme de nouveaux concurrents. Il en est résulté la détérioration des parts de marché des entreprises des pays développés et une intensification de la concurrence à l’échelle mondiale.
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