Délocalisations et relocalisations dans les services
Même dans les services aux entreprises, la délocalisation de pans d’activités s’organise, comme dans l’industrie, en découpant les différentes opérations de la production, qui peut désormais être séparée de la consommation. Il est possible de fournir le service à distance. C’est le cas des centres d’appel, de la maintenance informatique, des services après-vente, etc. Quatre critères permettent de caractériser la délocalisation, les tâches et les fonctions des services : l’intensité d’usage des TIC ; la transférabilité du service à distance à l’aide des TIC (centres d’appel, par exemple) ; le degré de codification des connaissances ou savoirs (brevets, logiciels…) ; le caractère facultatif des relations de face-à-face entre fournisseurs et clients.
Des emplois à faible niveau de qualification chez les programmateurs sont perdus à la suite d’une délocalisation. Des tâches de comptabilité ou de maintenance informatique ont fait également l’objet d’une externalisation internationale. Mais des métiers hautement qualifiés sont également concernés : administration de réseaux, programmation et développement de logiciels, ingénierie, design, services juridiques, etc.
Mais, comme dans l’industrie, on trouve une forte hétérogénéité des pratiques : tandis que, pour le même type d’activité, certaines entreprises délocalisent dans des pays à bas salaires, d’autres produisent dans leur pays d’origine et d’autres encore relocalisent dans leur pays d’origine après avoir délocalisé.
Depuis le début des années 2000, une vague de relocalisations fait suite à l’accélération des délocalisations dans les services et à des problèmes de rationalisation des groupes, sous l’effet des contraintes de marché et de rendement actionnarial. Les imperfections des services délocalisés et les risques de perte de compétitivité pour les firmes qui y recourent les incitent à relocaliser : les groupes Dell et General Electric ont dû rapatrier une partie de leurs centres d’appel d’Inde en raison de difficultés de compréhension entre clients et techniciens ; les centres d’appel des Taxis bleus, délocalisés en Tunisie, ont également été relocalisés en France.
Dans le secteur financier, une partie des activités du groupe Lehman Brothers avaient été relocalisées aux États-Unis avant sa faillite en 2008, également en raison de difficultés de coordination des liens de sous-traitance et d’imperfection du service final fourni aux consommateurs. D’autres exemples peuvent être cités : Everdream, fournisseur de services d’informations technologiques, installée dans la Silicon Valley aux États-Unis, a délocalisé en 2002, par sous-traitance internationale, ses unités productives au Costa Rica. Cela s’est accompagné d’un programme de formation de l’équipe recrutée dans ce pays d’accueil. Mais les résultats en termes de compétences, dans ces secteurs où règne la compétition par l’innovation, n’ont pas été probants ; de sorte que la firme a décidé de relocaliser sa production aux États-Unis, dans des régions américaines présentant des coûts plus faibles que l’agglomération de la Silicon Valley.
Si les considérations relatives aux coûts de transaction et à la flexibilité ne sont pas absentes des choix de modes de coordination dans une division cognitive du travail, ces derniers font aussi intervenir d’autres critères. Les partenaires échangent des compétences complémentaires et dissemblables. Ils ont alors besoin d’une interaction plus dense entre eux.
Un processus de production découpé selon un principe cognitif présente généralement un degré de modularité moindre que lorsque des critères techniques ou tayloriens président au découpage des opérations. La coordination des fragments ne se détermine pas à l’avance dans une logique cognitive.